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Corruption au Bénin : Violation des principes fondamentaux dans les marchés publics

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La lutte contre la corruption a du plomb dans l’aile au Bénin. Malgré les actions engagées par le président Patrice Talon depuis son accession au pouvoir, des manœuvres frauduleuses demeurent dans la gestion de la commande publique.

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De la 126ème place en 2020, le Bénin se retrouve à la 150ème position en 2021 avec un score de 58.43 points, selon l’Indice Global de Corruption (GCI). La situation s’est donc dégradée en une année en matière de lutte contre la corruption. Plusieurs rapports d’audits ont d’ailleurs relevé des actes de corruption. Le 07 juillet 2021, le Conseil des Ministres a examiné le rapport d’une mission d’audit à l’Agence Nationale des Transports Terrestres (ANaTT), réalisée sur la période allant de 2016 à 2020. Il en ressort des irrégularités avec un préjudice financier estimé à 13,6 milliards de FCFA pour les caisses de l’Etat. Egalement, des agents et des responsables de la Recette des Douanes et Droits Indirects d’Hillacondji ont été mis aux arrêts pour acte de corruption à grande échelle qui coûterait entre 300 à 400 millions de francs CFA aux caisses de l’Etat.
Lorsqu’on regarde la carte établie par Transparency International dans son indice de perception de la corruption, édition 2021, le Bénin est encore loin de la moyenne requise pour se compter parmi les pays qui font des efforts louables dans la lutte contre la corruption. En 5 ans, le pays n’a évolué que de 3 points, le score passant de 39 points en 2017 à 42 points en 2021. En 2018, le score du pays passe à 40 points, puis s’établit à 41 points en 2019. La lutte contre la corruption n’a pas connu d’amélioration entre 2019 et 2020, selon les experts de Transparency International. Et pourtant, au fil des années, le gouvernement a renforcé sa stratégie visant à̀ promouvoir des réformes administratives et institutionnelles et à garantir la transparence dans la gestion publique.
Un fléau qui résiste aux mécanismes
La lutte contre la corruption au Bénin a commencé avec l’application des mesures politiques inspirées des institutions de Bretton Woods, et les nouveaux concepts de gouvernance : transparence, redevabilité et intégrité. L’arsenal juridique s’est progressivement mis en place. Ces efforts continus hissent le Bénin dans le top 5 des pays les moins corrompus de l’Afrique de l’ouest avec une avancée d’un point par rapport à l’année 2020.
Des institutions de lutte contre la corruption telles que le Haut-commissariat à la prévention de la corruption érigé sur les cendres de l’Autorité́ Nationale de Lutte contre la Corruption ; l’Autorité́ de Régulation des Marchés Publics ; la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) instituées par la loi n° 2018-13 du 02 Juillet 2018 portant organisation judiciaire en République du Bénin ont été installées.
Mais le fléau tend ses tentacules malgré l’engagement des autorités à lutter contre la corruption et l’impunité et l’arsenal juridique renforcé. Les résultats de la plus récente enquête d’Afrobarometer au Bénin indiquent que, pour une grande majorité des citoyens, le niveau de corruption dans le pays a diminué mais au vu de plusieurs indicateurs, beaucoup de Béninois perçoivent leurs dirigeants comme corrompus et craignent des représailles s’ils signalent des actes de corruption. Dans la zone de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), la situation s’est améliorée en Côte-d’Ivoire, au Mali et en Guinée Bissau.
Malgré l’évolution du cadre juridique et une vigilance accrue de la société civile et des médias, la corruption demeure au cœur des grands débats nationaux. C’est d’ailleurs, ce qui fait que le phénomène persiste et fait son chemin malgré les sanctions de l’ARMP. Pour preuve, la Personne responsable des marchés publics du ministère de la justice et de la législation est exclue de la commande publique. L’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) à travers la décision N°2022-104/ARMP/PR-CR/CRD-SP/DRAJ/SA du 26 août 2022 a suspendu Gansou Gbenakpon Richard pour une période de 05 ans. Pour compter du 31 août 2022 au 30 août 2027, Gansou Gbenakpon Richard, Personne responsable des marchés publics du ministère de la justice est exclue de la commande publique en République du Bénin. Selon la décision de l’ARMP, le mis en cause ne peut pas participer aux travaux des organes de passation, de contrôle et de régulation de la commande publique au Bénin, ni postuler à quelque titre que ce soit, aux marchés publics en République du Bénin. Cette décision fait suite à une auto-saisine de l’ARMP pour enquêter sur les irrégularités constatées lors de l’instruction du recours de l’entreprise ‘’TRIOMPHE AFRIQUE GROUP’’ contre le ministère de la Justice et de la législation (MJL) dans le cadre de la procédure de Demande de Renseignements et de Prix (DRP) relatif au recrutement d’un cabinet pour l’appui au processus d’élaboration du Programme national de développement du secteur de la justice, Phase II.
Lors de l’examen demandé, deux irrégularités ont été relevées. Il s’agit de « l’utilisation d’un dossier d’appel à concurrence inadéquat » et de « l’inobservance de l’obligation d’invitation des candidats à l’ouverture publique des propositions financières ». L’auto-saisine de l’ARMP vise à sanctionner la méconnaissance de la réglementation notamment de certains principes de la commande publique et régies spécifiques applicables aux procédures de passation des marchés de prestations intellectuelles. Ces principes et règles spécifiques sont édictés par le code des marchés publics au Bénin, en ses articles 7 et 36 ainsi que par le décret n° 2020-602 du 23 décembre 2020 portant approbation des documents-types de passation des marchés publics au Bénin. L’ARMP après avoir exclu la PRMP du ministère de la justice a recommandé des sanctions de suspension contre Ogou Sourou Jean et Allou Sero Saka, délégués de contrôle des marchés publics au ministère de la justice.
A la suite du classement de Transparency international qui attribue un score négatif au Bénin, Global Risk Profile peint la situation du pays en rouge. Les acteurs de l’administration publique continuent de commettre leur forfait, surtout dans les marchés publics, lors des recrutements, pour ne citer que ceux-là. Le gouvernement devra repenser sa stratégie de lutte contre la corruption. Des réformes urgentes seraient opportunes pour enrayer le fléau notamment dans les marchés publics.

Julien Agbezounhlon

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