Learder de l'information

Tradition et modernité :  Les clés de la paix et de la cohésion sociale au Bénin selon le prêtre fâ Ardant Prost DJENONTIN

0 54

Dans un monde en perpétuelle mutation, où la modernité impose ses normes et bouleverse les repères, la tradition demeure un pilier essentiel de l’identité et du vivre-ensemble. Invité sur le plateau d’Eden TV, Ardant Prost DJENONTIN, chercheur en humanités classiques et prêtre fâ, éclaire sur le rôle fondamental de la tradition dans la construction de la paix et de la cohésion sociale au Bénin. Entre transmission des savoirs ancestraux et préservation des valeurs, son discours engage une réflexion profonde sur la nécessité de renouer avec nos racines pour garantir un développement harmonieux.

Un socle identitaire incontournable

 

« Si nous sommes Béninois, c’est la tradition qui fait que nous sommes Béninois », martèle Ardant Prost DJENONTIN d’entrée de jeu. Selon lui, l’identité d’un peuple ne se définit pas uniquement par des frontières géographiques, mais avant tout par un héritage culturel et spirituel. Loin d’être une simple coutume folklorique, la tradition est une science, une architecture sociale qui façonne les mentalités et oriente le développement.

Loin de l’idée reçue d’un Bénin figé dans le passé, il insiste sur la nécessité d’intégrer ces savoirs ancestraux dans les dynamiques modernes. « L’économie, c’est de l’histoire », affirme-t-il, dénonçant une mondialisation qui tend à effacer la mémoire collective des peuples. Pour lui, une nation qui ne valorise pas son histoire est une nation vulnérable face aux modèles imposés de l’extérieur.

 

Des valeurs traditionnelles au service de la paix

Historiquement, la société béninoise s’est construite sur des systèmes de gouvernance qui privilégient le bien-être collectif. Sous les royautés d’antan, l’organisation sociale reposait sur la chefferie traditionnelle, qui mettait l’accent sur la famille comme première unité de stabilité. Chaque lignée était détentrice d’un savoir particulier, qu’il s’agisse de la forge, de la divination ou encore de la médecine traditionnelle.

Les divinités et institutions spirituelles jouaient également un rôle clé dans le maintien de l’équilibre social. L’exemple de la divinité **Heviosso**, gardienne de la justice, illustre cette volonté d’un ordre harmonieux fondé sur l’équité et la vérité. Chaque année, les prêtres de la science Ifa consultent l’oracle du *Tofa* pour anticiper les défis à venir et guider la nation. Cette approche permet d’éviter les tensions et de prendre des décisions éclairées pour préserver la stabilité du pays.

 

Dans un contexte où les conflits se multiplient aux frontières du Bénin, Ardant Prost DJENONTIN souligne le rôle primordial des chefs traditionnels et religieux dans la préservation de la paix. « Nos ancêtres ont déclaré qu’il n’y aurait plus de guerre au Bénin », rappelle-t-il. Un engagement qui se traduit par des rites et des sacrifices continus pour sécuriser le territoire sur le plan spirituel.

 

Défis et résistance face à la modernité

Si la tradition est un rempart contre les fractures sociales, elle est aujourd’hui mise à rude épreuve par la modernisation et la mondialisation. Le chercheur pointe du doigt l’un des principaux obstacles : la cupidité. Dans un monde régi par l’argent, les valeurs de solidarité et de transmission tendent à s’effacer au profit d’une quête effrénée du profit.

L’abandon progressif des initiations en est une conséquence directe. « L’initiation est difficile, c’est une épreuve d’humiliation et de dépassement », explique-t-il. Pourtant, c’est cette transmission rigoureuse des savoirs qui permettait autrefois de garantir la pérennité des institutions traditionnelles et de structurer la société.

Il déplore également la marginalisation des traditions dans les politiques publiques. L’absence de reconnaissance légale des chefferies traditionnelles empêche une véritable articulation entre l’héritage ancestral et les structures modernes. À ce titre, il milite pour une législation qui réintègre pleinement ces autorités dans la gouvernance nationale.

Réconcilier tradition et modernité pour un avenir durable

Ardant Prost DJENONTIN appelle à une revalorisation des richesses culturelles du Bénin, non seulement comme levier identitaire, mais aussi comme moteur économique. Il cite l’exemple du *Zinli*, danse traditionnelle béninoise, qui pourrait devenir un produit d’exportation au même titre que les musiques occidentales. En structurant ces savoirs sous forme d’institutions éducatives et artistiques, le Bénin pourrait non seulement préserver son patrimoine, mais aussi générer des ressources et créer des opportunités.

En définitive, son plaidoyer est un appel à un équilibre entre héritage et modernité. La tradition, loin d’être un frein au progrès, est une fondation solide sur laquelle bâtir un avenir harmonieux. Dans un monde en quête de repères, il rappelle que la paix et la cohésion sociale ne se décrètent pas, elles se construisent à travers la reconnaissance de nos essences et la valorisation de nos racines. Pour finir il lance un appel à toutes les forces vives de la nation , d’œuvrer et de s’engager pleinement pour que le tissu social béninois ne soit jamais ébranlé et que tous les acteurs , toutes les forces vives de notre pays, se mobilisent amplement et grandement pour la paix!

Marc Johannès GOUDJANOU

Leave A Reply

Your email address will not be published.