De l’ORTB à la SRTB : Dr Jeanne AGNILA MEDAGBE fait une analyse sur le comité de validation des contenus en gestation
Les dernières réformes opérées par le régime du président Patrice Talon au niveau de l’Office de Radiodiffusion et Télévision du Bénin (ORTB) l’ont conféré une nouvelle dénomination : Société de Radio et Télévision du Bénin (SRTB) avec un autre mode de gestion du contenu des programmes. A travers une analyse approfondie, madame Jeanne AGNILA MEDAGBE, docteure en droit public de l’Université d’Abomey-Calavi et docteure en Journaliste de Paix de l’Université Protestante d’Afrique Centrale (UPAC) a fait ressortir les aspects positifs et négatifs de cette mutation.
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L’Office de radiodiffusion et télévision du Bénin, ORTB na pas échappé aux vents des reformes qui s’opèrent sous le régime de la rupture. D’ailleurs l’office a été rebaptisé et est devenu SRTB (Société de Radio et Télévision du Bénin). Cet office donc, après le passage à un autre nom, veut nous soumettre à une nouvelle mesure.
En effet, une note de service n°0549/DG/SG/CSAJ du 02 octobre 2023, annoncerait la mise en place dun comité de validation. Le Directeur Général de l’ORTB, informait récemment, selon la presse, le personnel de la mise en place de ce comité qui va désormais valider les contenus diffusés sur la télévision nationale. Dans la note de service, il est expressément écrit que « la diffusion de tout contenu est subordonnée à l’avis favorable de ce comité »
Si dans cette mesure, on entrevoit un souci de mieux faire, elle suscite néanmoins des interrogations dans l’opinion publique, et au sein des professionnels des médias qui s’en inquiètent quelque peu. Personnellement, cette mesure suscite en moi des questionnements :
Quelles sont les réelles attributions de ce comité ?
Qui en sont les membres et leurs profils ?
Sont-ils représentatifs de l’ensemble des intérêts politico-sociétaux que doit sauvegarder cet office ?
Sont-ils investis dune mission de censure des programmes ?
En effet, l’Ortb, qui, depuis plusieurs années est face à une concurrence de plus en plus grandissante et rude, tente de se tailler la part du lion sur la scène médiatique béninoise, pour mériter son nom de chaine nationale. Pourtant, elle doit aussi lutter pour se positionner sur le plan international vu qu’elle est sur le bouquet Canal+. Sa nature d’organe de presse de service public l’oblige à un devoir de qualité des programmes.
Le passage d’ORTB à SRTB témoigne certainement de la volonté du chef de l’État Patrice TALON, qui depuis 2016 a entrepris des reformes dans divers secteurs, de faire de cet office un pôle d’excellence et un levier de développement. Et jose croire que ce ne sera pas de la poudre aux yeux. Pour ce faire, un travail de fond mérite d’être fait, partant de l’élaboration d’une nouvelle grille des programmes. Celle-ci ne devra pas être « nouvelle », juste par son nom, comme cela se fait à chaque rentrée télévisuelle ou radiophonique.
D’ailleurs, dans son mémoire consacré à la rentrée télévisuelle intitulé « Contribution à l’amélioration de la rentrée télévisuelle sur l’ORTB », Jean-Philippe Erick Abraham l’actuel Directeur Général signataire de la note, prouvait en 2008, qu’à 63,67%, les téléspectateurs expriment la non satisfaction de leur besoin par les programmes proposés lors de la rentrée télévisuelle.
Selon une étude conduite personnellement sur la réception du journal télévisée de l’ORTB, 91% des personnes enquêtées préféraient se rabattre sur les télévisions privées pour avoir des informations pluralistes, posant ainsi le problème de la qualité des contenus.
S’il est vrai que les contenus posent problème, la grille des programmes ne répond pas aux principes clés du service public. La grille des programmes de l’office répond encore moins aux attentes des populations qui deviennent de plus en plus exigeantes. Non seulement la grille des programmes se doit d’être revue, améliorée suivant une procédure technique rigoureuse, mais également le contenu des programmes mérite une attention particulière. Ce comité aura alors du pain sur la planche et il doit impérativement combler les attentes. Et jose espérer qu’il ne va pas foncer dans le labyrinthe des intérêts, qu’il ne sera pas un goulot d’étranglement pour les programmes, les pieds empêtrés dans les câbles, et enfin, que ce comité ne sera pas du copinage, des récompenses politiques, ni un comité de censure déguisé. Surtout qu’il arbore la tunique de Rédacteur en Chef
Madame Jeanne AGNILA MEDAGBÉ,
Docteure en Droit Public de l’UAC- Bénin
Docteure en Journalisme de Paix de l’UPAC-Cameroun
Coordonnatrice de la filière Journaliste de Paix à l’UPAC/Spécialiste du Droit des Médias