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Gouvernance locale au Bénin: Les observations de  Claude Cossi DJANKAKI sur le projet de réforme structurelle de la décentralisation

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Sur les préoccupations de mes compatriotes visant à connaître mes observations sur la réforme en cours,  j’avoue qu’après deux décennies de pratique qu’il faille corriger ce qui marche le moins bien.

Si la volonté politique est d’aller aux transferts de compétences pour faire confectionner enfin un budget de développement à chacune de nos communes, c’est une initiative salutaire.

Malheureusement, les réformes dans le monde politique sont juste un alibi pour soulever les  idées nobles en vue de faire appel  à la loi pour contourner le droit.

Tous les principes que notre société civilisée a mis des millénaires pour bâtir n’existent plus. Toutes les digues sont rompues. Les dirigeants sont parfois déconnectés des réalités sociétales.

Je rappelle surtout ces choses  parce que le parcours professionnel qui est le mien a l’avantage d’avoir plus de réponses à donner que des questions à poser.

Nous devons arrêter de nous mentir maintenant et de n’avoir que pour ennemi, la misère et la détresse de nos populations.

Nous savons tous qu’une véritable démocratie a des exigences.

Qui, parmi nous peut nier qu’il ne saurait y avoir une opposition crédible avec possibilité d’alternance de l’exercice du pouvoir dans une démocratie ?

Lorsque je prends l’élément qui incarne le monstre à trois têtes dans la réforme,  j’ai immédiatement peur.  J’y vois déjà des non-dits. J’ai toujours peur de ce qui s’apparente à un triumvirat. J’avoue mon hostilité à deux organes délibérants dans une assemblée locale, à savoir un conseil communal secondé par un conseil de supervision composé du Maire, des Adjoints au Maire et des Pts des commissions  permanentes. Je crains ce Secrétaire Exécutif qui va jouer à la place du Maire le rôle de l’ordonnateur du budget. La souveraineté du chef est une tradition africaine. L’on comprend alors le cri de désespoir du Maire de Kpomassè Mr Kénam Mensah qui dit exactement ceci :

Un budget c’est un instrument politique.  Le Maire, s’il ne suit pas son budget, s’il ne règle, il ne serait pas un homme politique. Le Secrétaire Exécutif va s’opposer à vous (le Maire) parce qu’il n’est pas de votre bord, parce qu’il ne soutient pas vos idées… C’est pourquoi je dis, il faut nous remettre notre budget. Si vous enlevez le budget, vous avez vidé le Maire de son contenu, car on va dire au village que lui, il n’a plus rien. (Fin de citation)

Au regard de ces préalables nécessaires, il urge de faire deux observations.

 1- Sur la forme

La question que l’on peut se poser est de savoir si le Gouvernement est resté depuis 2016 dans la même logique de transformation du modèle politique béninois.

Certes, la mission de l’ordonnateur du budget communal revient de droit a la tête exécutive, Chef de l’administration communale, Président du conseil communal ou municipal que constitue le Maire. Comme dans les Préfectures, les Départements ministériels, les autres Institutions de la République.

Mais, peut-on avoir joué avec l’État de droit et venir chercher à se retirer du répertoire des pompiers incendiaires et irresponsables ?

La moralité de l’affaire : Ça n’arrive pas qu’aux autres.

Nous avions tous été témoins d’un certain nombre de cas de passe-droit.

1 Avons-nous  oublié le cas d’un Maire déporté de la région où il est Maire pour être candidat d’une grande ville alors que son domicile est légalement fixé ?

2/ Que dire des verrous de 10% de suffrages nécessaires à l’échelle nationale avant de valider son élection alors que, ce qui caractérise la décentralisation c’est la séparation des affaires nationales des affaires locales ?

3-Les Maires virtuellement élus par le conseil communal ou municipal qui attendaient les formalités d’usage mais déjoués in extrémis par le jeu d’une loi interprétative votée d’urgence au cours de la compétition peuvent-ils  oublier aussi facilement cette méthode frauduleuse déguisée légale ?

Tout ceci pour dire, lorsque vous avez été complice actif ou passif, bénéficiaire d’un passe-droit vous n’êtes plus indiqué à venir jouer aux moralisateurs de la vie publique. Car, un adage populaire fon dit: On ne mange pas la viande de la grenouille pour en refuser la tête.

 2- Sur le fond de la réforme de la décentralisation

Je voudrais à ce sujet plaider pour la nécessité d’un dialogue entre les différents acteurs politiques.

La seule réforme qui peut produire le meilleur climat de paix et de concorde national aujourd’hui est l’ouverture au dialogue. C’est ce qui avait été fait en 2002 soit le lendemain des élections présidentielles de 2001 où le Président Mathieu Kérékou a été réélu dans les conditions qualifiées par l’opposition de tripatouillage.

Lorsqu’un pays est profondément divisé, la décentralisation offre un mécanisme institutionnel qui associe les opposants à la gestion des affaires locales.

Je ne vois pas le Gouvernement réussir aujourd’hui cette réforme de la  décentralisation, qui comporte plus de non-dit aux réelles préoccupations claires et lisibles.

La problématique doit être, quel type de management des collectivités territoriales ?

L’interférence de l’Etat dans la gestion des collectivités territoriales par les secrétaires exécutifs a toujours entraîné le financement des dépenses de souveraineté ou de prestige de l’État sur le budget des communes. C’est pourquoi, tirant leçon du passé, l’article 152 de la constitution du 11 décembre 1990 énonce : aucune dépense de souveraineté de l’Etat ne saurait être imputée à leur budget. Le Maire de Kpomassè a donc raison de crier au secours.

 

Claude C DJANKAKI

Expert en Finances Publiques et Décentralisation

Agréé par l’institut International d’Administration Publique de Paris (IIAPP)

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